Wayne Shorter : The Classic Blue Note Recordings

Cet album tient une place à part dans ma jazzothèque. Ila été le support à mon initiation au jazz. Je l’ai écouté, réécouté, et encore réécouté jusqu’à ce que mon oreille se familiarise aux accents de cette musique où se conjuguent le thème propre à chaque composition et les improvisations. Au début, j’avais du mal à faire le lien entre les parties improvisées et le thème musical repris normalement à l’unisson par tous les musiciens de la session. J’essayais aussi de m’ouvrir aux inflexions du saxophone de Wayne Shorter afin d’en percevoir la substantielle moëlle. Je tentais également de faire la distinction le jeu des différents accompagnateurs. On distingue aisément la voix de deux chanteurs. La voix de Peter Gabriel est bien différente de celle de David Bowie. C’est évident. Mais comment distinguer le jeu au piano de Herbie Hancock (dont j’avais déjà entendu parler) et celui de Mc Coy Tyner que je découvrais ici…. En suis-je même capable aujourd’hui ?

Il faut également dire que cette compilation consacrée à Wayne Shorter est construite avec beaucoup d’intelligence. Le Disque 1 comporte une suite chronologique de titres extraits d’albums qui ont comme leader le saxophoniste alors que le Disque 2 est également construit chronologiquement mais est basé sur des titres où Wayne Shorter intervient comme sideman. J’ai été tout de suite étonné par le fait que ce musicien qui me fascinait de plus en plus au fil des écoutes s’affirmait tout aussi bien en tant que leader qu’accompagnateur Je découvrirai par la suite que c’était là une des marques des grands musiciens.  

Mais pourquoi avoir jeté mon dévolu pour être initié au jazz sur Wayne Shorter (excellente question, n’est-ce pas ?). La raison ne s’explique pas autrement que le coup de foudre (et j’y reviendrai souvent dans ce blog) que j’ai eu très tôt pour Jaco Pastorius, ce bassiste de génie qui m’a amené au jazz. Bien sûr, grand amateur de jazz progressif, avant que se déclare ma passion aujourd’hui encore inassouvie pour le jazz, je connaissais le groupe de jazz-rock (plus tard j’appris qu’on utilisait préférentiellement l’expression jazz fusion) Weather Report. Mais c’est bien plus tard que je sus que l’un des deux leaders du groupe était un certain Wayne Shorter et que Jaco Pastorius avait été leur bassiste pendant de longues années. De Jaco Pastorius à Wayne Shorter, il n’y avait qu’un pas. L’apprentissage de l’écoute du jazz pouvait enfin démarrer sur des bases solides.